Paradoxe EPR

Le paradoxe Einstein-Podolsky-Rosen, abrégé en EPR, est une expérience de pensée élaborée par Albert Einstein, Boris Podolsky, et Nathan Rosen, et dont l'objectif premier était de réfuter l'interprétation de Copenhague de la physique quantique.



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Le paradoxe Einstein-Podolsky-Rosen, abrégé en EPR, est une expérience de pensée élaborée par Albert Einstein, Boris Podolsky, et Nathan Rosen, et dont l'objectif premier était de réfuter l'interprétation de Copenhague de la physique quantique.

L'interprétation de Copenhague s'oppose à l'existence d'un quelconque état d'un dispositif quantique avant toute mesure. En effet, il n'existe pas de preuve que cet état existe avant son observation et le supposer amène à certaines contradictions.

Or, si deux particules sont émises et qu'une relation de conservation existe entre une de leurs propriétés (par exemple, la somme de leurs spins doit être nulle, c'est-à-dire qu'il y a intrication de l'état du dispositif de ces deux particules), la connaissance de l'état de la première après une mesure effectuée sur celle-ci nous informe sur l'état dans lequel se trouvera obligatoirement la seconde particule après une mesure effectuée sur celle-là : si la mesure sur la première particule a donné (aléatoirement) "+", et que la première particule se trouve par conséquent dorénavant dans l'état "+", la mesure sur la seconde donnera toujours "-", et vice-versa. Mais cette dernière particule peut, à l'instant de la mesure, se trouver à plusieurs kilomètres de la première, la ligne d'univers qui relie les deux évènements "mesure sur la particule 1" et "mesure sur la particule 2" de l'espace-temps peut même être une courbe de genre espace, et la seconde particule ne peut par conséquent totalement pas, dans ce dernier cas, "être informée" de quelque façon que ce soit de l'état dans lequel se trouvait la première après la mesure. Comment croire, dans ces conditions, que l'état dans lequel on trouve la seconde particule après la mesure n'était pas déterminée dès le départ, en contradiction avec la représentation de Copenhague ?

Ce paradoxe fut élaboré par Albert Einstein et deux de ses collaborateurs Boris Podolsky et Nathan Rosen pour soulever ce qui semblait apparaître comme une contradiction dans la mécanique quantique, ou du moins une contradiction avec au moins l'une des trois hypothèses suivantes :

  1. impossibilité pour un signal de dépasser la vitesse c (causalité relativiste)  ;
  2. la mécanique quantique est complète et décrit entièrement la réalité (pas de variable cachée locale)  ;
  3. les deux particules éloignées forment deux entités pouvant être reconnues indépendamment l'une de l'autre, chacune étant située dans l'espace-temps (localité).

L'argument EPR

L'argument EPR, tel que présenté en 1935[1], est fondé sur le raisonnement suivant.

Dans un premier temps il faut rappeler que le principe d'indétermination interdit de connaître simultanément la valeur précise de deux quantités physiques dites incompatibles (typiquement, la vitesse et la position d'une particule). Plus on mesure avec précision une quantité, plus la mesure de l'autre est indéterminée.

En conséquence de ce principe, EPR en déduit deux affirmations mutuellement exclusives :

  1. Soit la description de la réalité donnée par la mécanique quantique n'est pas complète.
  2. Soit les deux quantités physiques incompatibles n'ont pas simultanément une réalité objective.

L'interprétation de Copenhague arrive à la conclusion que 2) est vrai et 1) est faux, tandis que EPR entendent démontrer que 1) est vrai et 2) est faux.

Pour cela, ils mettent au point une expérience de pensée qui mène à la détermination simultanée de deux quantités physiques non-commutables, et par conséquent à la conclusion que 2) est faux et donc (les deux affirmations étant mutuellement exclusives) que 1) est vrai.

Pour démontrer que 2) est faux, il est indispensable de définir exactement ce qu'est la notion de "réalité" d'une quantité physique (par exemple la "position"). EPR mettent en évidence une condition suffisante de "réalité" :

Le "système expérimental" (de pensée) proposé en 1935 est assez complexe, mais peut être décrit de manière plus simple sans en changer l'esprit.

Soit deux photons P1 et P2 intriqués de façon à avoir un moment angulaire total identique à zéro (spins anti-corrélés). Les deux quantités physiques non-commutables utilisée dans le raisonnement sont : 1) Le spin mesuré selon une direction Sx 2) Le spin mesuré selon une autre direction Sz.

Si on mesure P1 selon Sx, alors - sans aucunement perturber P2 (on suppose le principe de localité) on connait obligatoirement la mesure de P2 selon cet axe (l'opposé).

De même, si on mesure P2 selon Sz, alors - sans aucunement perturber P1, on connait obligatoirement la mesure de P1 selon cet axe (l'opposé aussi).

Donc, la mesure de P1 selon un axe et de P2 selon l'autre sert à prédire avec certitude la valeur des deux quantités physique. Ces deux quantités possèdent par conséquent une réalité objective, et donc 2) est faux et 1) est vrai.

Tel est le paradoxe formulé originellement par EPR.

L'intrication : deux interprétations envisageables

Soient deux photons intriqués, polarisés perpendiculairement l'un comparé à l'autre. Ces photons sont dans un état juxtaposé, avec deux possibilités : 1) Le premier photon est polarisé verticalement et le second horizontalement 2) L'état inverse. Alors la mesure de la polarisation d'un photon implique obligatoirement que le second photon sera polarisé perpendiculairement au premier, quel que soit l'état de polarisation mesuré pour un photon (que on ne peut prévoir).

En effet, selon la mécanique quantique, avant la mesure, la polarisation de ces photons est indéterminée. Les photons sont dans un état juxtaposé entre les polarisations horizontale et verticale, c'est-à-dire qu'il y a une chance sur deux d'obtenir une polarisation horizontale lors de la mesure, et une chance sur deux d'obtenir une polarisation verticale.

Dans la mesure où l'état de polarisation de chaque photon semble aléatoirement déterminé au moment de la mesure, comment expliquer que les deux photons soient toujours perpendiculaires ? Deux interprétations sont envisageables :

Le paradoxe

Ce n'était en apparence qu'un débat philosophique entre deux manières de voir des phénomènes car ces deux points de vue donnaient a priori le même résultat. Mais dans certaines conditions spécifiques, ces deux conceptions n'étaient pas compatibles. Albert Einstein a élaboré un paradoxe : le paradoxe EPR, du nom de ses inventeurs.

Le principe du paradoxe est de mesurer simultanément (dans un intervalle de temps suffisamment court pour que l'information n'ait pas le temps de se propager d'une particule à l'autre, la ligne d'univers qui relie les deux évènements "mesure sur la particule 1" et "mesure sur la particule 2" de l'espace-temps étant une courbe de genre espace) deux grandeurs s'excluant, telles que la position et la vitesse, ce qui serait en violation avec les inégalités d'Heisenberg, et qui donnerait plus d'information que ce que la mécanique quantique prétend décrire, pour prouver que cette théorie est incomplète.

Einstein propose ensuite de perfectionner la mécanique quantique en introduisant une théorie utilisant des variables cachées locales.

Le débat entre Einstein et Bohr

Niels Bohr a répondu immédiatement en rejetant les variables cachées locales, et en insistant sur le fait que les états quantiques n'existent pas tant qu'ils n'ont pas été mesurés. Avant la mesure, on ne peut que prévoir des probabilités d'obtenir certaines valeurs pour un état quantique. Il n'y a de déterminisme dans le résultat d'une mesure (probabilité identique à 1 de trouver le résultat attendu de la mesure) que si une mesure précédente a déterminé l'état quantique dans lequel se trouve le dispositif après la première mesure, et tant qu'une mesure incompatible avec la première (mesure de la position, après avoir déterminé la quantité de mouvement, par exemple - puisque, dans ce cas, les opérateurs associés aux observables ne commutent pas) n'a pas détruit l'état quantique qui avait été induit par la première mesure. Aujourd'hui, énormément de physiciens pensent que la décohérence quantique pourrait expliquer rationnellement cette propriété étrange des états quantiques.

Albert Einstein n'a jamais accepté le concept d'influence instantanée à distance impliqué par l'interprétation de Copenhague de la mécanique quantique, concept qu'il qualifiait "d'action surnaturelle à distance". Le débat entre Einstein et Bohr sur ce paradoxe a duré 20 ans, jusqu'à la fin de leur vie.

Les expériences

Icône de détail Article détaillé : Expérience d'Aspect.

En 1964, John Stewart Bell produisit un théorème servant à quantifier les implications du paradoxe EPR, ouvrant la voie à l'expérimentation : par conséquent la résolution du paradoxe EPR pouvait devenir une question expérimentale, plutôt qu'un choix épistémologique.

La technologie de l'époque ne permettait pas de réaliser une expérience testant les inégalités de Bell, mais Alain Aspect a pu le réaliser en 1981, puis en 1982, à Orsay, confirmant la validité des prédictions de la mécanique quantique dans le cas du paradoxe EPR. Cette expérience d'Aspect procédait d'une idée qu'il avait publiée dès 1976[2] mais que personne n'avait reprise depuis.

En 1988-1989, d'autres expériences (Maryland, Rochester[3], [4]), toujours plus peaufinées, ont permis de tester les intrications à particulièrement longue distance et de combler des petites failles expérimentales laissées ouvertes par les expériences d'Orsay.

Cependant, si ces expériences impliquent qu'on renonce à l'une des trois hypothèses (on s'est décidé pour la non-localité, la mécanique quantique devenant une théorie physique non-locale), elle ne permettent nullement la transmission d'un signal plus vite que la lumière (sans quoi d'ailleurs soit la causalité, soit la relativité serait violée).

Un enthousiasme encombrant

Un colloque organisé de façon hâtive à Cordoue[5] — non par des physiciens, quoique plusieurs fussent invités — fut l'occasion pour un certain nombre de «parapsychologues» ou spécialistes des «sciences occultes» de se réclamer de cette expérience pour alléguer de la possibilité théorique de phénomènes comme télépathie, télékinésie, synchronicité et autres, au milieu de physiciens qui ne pouvaient démentir. Cette excitation explicable probablement par la nouveauté du propos se calma ensuite, et l'effet EPR fait actuellement partie du quotidien de la physique.

Le chercheur Étienne Klein donne une métaphore romantique de l'effet EPR : Deux cœurs qui ont interagi dans le passé ne peuvent plus être reconnus de la même manière que s'ils ne s'étaient jamais rencontrés. Marqués à jamais par leur rencontre, ils forment un tout inséparable. Cette interprétation n'est pas si dépourvue d'intérêt scientifique qu'il n'y paraît : Étienne Klein, dans ses travaux de vulgarisation, a toujours tenté de montrer comment les phénomènes de physique quantique tenus pour des paradoxes de cette discipline ressemblent à des effets particulièrement familiers.

L'erreur commune selon laquelle l'effet EPR pourrait servir à transmettre de l'information instantanément est répandue jusque dans la littérature pour enfants : dans À la croisée des mondes, les espions communiquent (y compris entre différents univers parallèles) avec des systèmes exploitant cet effet.

Des conclusions plus sereines

Les points établis par cette expérience sont les suivants :

Finalement, le principe de causalité reste valable, du fait que on considère généralement qu'il n'y a pas de lien de cause à effet entre l'entrée de la partie A et le résultat de la partie B et inversement, quoique les résultats de mesure des deux particules ne soient pas des événements indépendants différents, parce que les parties A et B sont intriquées et qu'elles ne peuvent être reconnues indépendamment l'une de l'autre, même si la ligne d'univers qui relie les deux évènements "mesure A" et "mesure B" de l'espace-temps est une courbe de genre espace.

De même, le principe de relativité reste valable ; la raison est que le résultat de la mesure relatif à la première particule est toujours aléatoire, dans le cas des états intriqués comme dans le cas des états non-intriqués ; il est par conséquent impossible de «transmettre» quelque information que ce soit, puisque la modification de l'état de l'autre particule, pour immédiate qu'elle soit, conduit à un résultat de la mesure relatif à la seconde particule qui est toujours aussi aléatoire que celui relatif à la première particule ; les corrélations entre les mesures des deux particules, quoique particulièrement réelles et mises en évidence dans de nombreux laboratoires de par le monde, resteront indétectables tant que les résultats des mesures ne seront pas comparés, ce qui implique obligatoirement un échange d'information classique, respectueux de la Relativité.

En revanche, le fait que la mécanique quantique tolère l'existence d'états intriqués, états ayant effectivement été observés en laboratoire et dont le comportement est en accord avec celui prévu par la mécanique quantique, implique indubitablement que la mécanique quantique est une théorie physique non-locale.

Références

  1. (en) A. Einstein, B. Podolsky et N. Rosen, «Can Quantum-Mechanical Description of Physical Reality Be Considered Complete?», dans Phys. Rev. , vol.  47, 1935, p.  777-780 [résumé, texte intégral]
  2. Proposed experiment to test the non-separability of quantum mechanics, A. Aspect, Phys. Rev. D 14, 1944–1951 (1976)
  3. Shih, Y. H. & Alley, C. O. Phys. Rev. Lett. 61, 2921–2924 (1988)
  4. Ou, Z. Y. & Mandel, L. Phys. Rev. Lett. 61, 50–53 (1988)
  5. Colloque mondial de Cordoue organisé par France Culture du 1 au 5 octobre 1979, Science et conscience : les deux lectures de l'univers, Stock, 1980, 495 p. (ISBN 9782234013438)

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